De si beaux souvenirs
L’Amérique du Sud, terre
ancestrale des civilisations amérindiennes, s’est très souvent invitée dans mes
rêves ! L’été 2015, un projet m’avait particulièrement enthousiasmée: la
découverte d’une petite partie de la
terre argentine ( ce gigantesque pays représente une superficie de plus de cinq
fois la France )
De nombreux reportages m’avaient fait découvrir sa pampa
plurielle, les rugissantes chutes d’Iguaçu (enchâssées dans la forêt vierge à
la frontière de l Argentine et du Brésil , plus hautes et plus abondantes que celles du Niagara ), les steppes
venteuses et infinies de la Patagonie,
l’ archipel sauvage de la terre de feu avec Ushuaia , la ville la plus australe
du monde . J’oubliais les contreforts de la barrière montagneuse des Andes,
berceau des premiers peuples d’Argentine.
J’ai toujours ressenti de la
compassion pour ce peuple qui avait subi des décennies de dictature, vécu l’effondrement
du système économique et financier ; Je n’étais pas sans ignorer le flux
d’immigrants européens qui, de 1895 à 1946, courageusement ont fui leur patrie
à la recherche d’un monde meilleur et se sont, en partie , posés sur la rive
ouest du Rio de La Plata .
Le 16 Novembre 2015, de Roissy-Charles-de-Gaulle,
avec Air France, nous nous embarquions avec, pour moi, la certitude de ne pas
être déçue ! 14 heures plus tard,
nous atterrissions sur le tarmac de l’aéroport international d’Ezeiza; Il était
9h, heure locale ; Nous nous trouvions à 35 km de Buenos Aires. Fouler le
sol de cette lointaine terre m’a procuré une indicible émotion !
Les saisons étant inversées, le printemps
austral nous accueillait avec l’exubérance de ses couleurs et la douceur de son
climat, De délicates fleurs bleu-lavande saupoudraient les jacarandas ! Les
callistémons citrinus montraient avec fierté leurs doux épis, rouge flamboyant,
ressemblant à des goupillons, les magnolias au port élégant étaient couverts de
grandes fleurs blanches ! Une palette de couleurs !
Notre hôtel : le Kenton
Palace, de très bon confort, est situé dans le quartier San Telmo. La capitale est formée de 48 quartiers ou
Barrios ; les habitants s’appellent les Portenos !
A 300 m de notre hôtel,
se situe la Plaza de Mayo ou place de Mai ; C’est sur cette place que se
déroula, le 17 Octobre 1945, la démonstration de force de Juan Peron (celui-ci
fut libéré de prison et proclamera la naissance d’un nouveau mouvement, le
Péronisme) ;
Le tour de cette place est un
véritable parcours historique ; les marches silencieuses des Madres, mères
des disparus de la « guerre sale »( entre 1976 et 1983) resteront
une image marquante d’une Argentine meurtrie : presque chaque après-midi,
la tête couverte d’un foulard blanc, les grands-mères de la Plaza de Mayo,
tournent dans le sens inverse des aiguilles d’une montre ; cette ronde
symbolisant la remontée du temps ; Sans relâche, elles effectuent des
recherches pour retrouver leurs petits-enfants
enlevés pendant la répression ! Leur obstination leur a déjà permis, à
l’issue de 38ans, d’identifier le 118ième petit enfant volé, en Août 2015
La Casa Rosada,
siège de la présidence et devant elle, la statue équestre du général Belgrano, brandissant
de son bras droit , le drapeau argentin. Engagé dans la guerre de libération
contre la domination espagnole, il créa en 1812 ,la Bandera ,le drapeau de l’
Argentine : deux bandes horizontales de même hauteur, bleu ciel, séparées
par une bande blanche sur laquelle , en son centre, un soleil appelé soleil de
maya, représentation du dieu Inca Inti , un visage humain d’oû partent 16
rayons solaires ondulés faisant penser à la traditionnelle représentation des
Incas , intercalés de 16 rayons droits
symbolisant la représentation européenne ; Ce soleil ne serait-il pas annonciateur d’une nouvelle aire de
liberté ?
Sur cette
place, l’édifice du Calbido historique (conseil municipal) et le Palacio Municipal
(hôtel de ville) ; Au centre, la Pyramide s’élève sur une hauteur de 19 m,
couronnée par une allégorie de la Liberté. Edifiée en 1811, elle célébrait le
premier anniversaire de la révolution.
Au nord de
la place, la cathédrale Métropolitaine ressemble à l’église de La Madeleine,
douze colonnes de style Corinthien forment son fronton et symbolisent les douze
apôtres. A l’intérieur, le mausolée du général José De San Martin, dit le
Liberator, dont la dépouille est veillée par des grenadiers en armes de l’armée
argentine
L’immense
Banco de la Nation Argentina (que nous avons eu le privilège de visiter), un
détail frappant : elle est surmontée d’une impressionnante coupole de
verre et d’acier. Au premier étage le Museo Numismatico (importante collection
de monnaies, de billets datant de l’époque coloniale)
Nous avons
rejoint le quartier St Nicolas, baptisé ainsi car en 1733 était construite
l’église St Nicolas De Bari. Détruite en 1936 pour y aménager la Plaza de la
Republica et y édifier l’obélisque, icône de la capitale ; Haut de 67,5 m,
tout en ciment blanc poli, il est centralisé sur un parvis du même ton. Pour le
peuple argentin, il rappelle quatre évènements historiques ; chacun est
gravé sur une plaque, sur ses quatre versants :
-Le 4ième centenaire de la 1ère fondation de
Buenos Aires en 1536.
-La première fois que fut hissé le drapeau
dans l’église St Nicolas de Bari qui était à cet endroit avant sa démolition en
1816
-La proclamation de la ville comme capitale
fédérale du pays en 1880.
-La deuxième
fondation de la ville, par Juan Garay en 1580.
L’obélisque s’élève sur
l’avenida 9 de Julio qui doit son nom à la date de la proclamation de l’indépendance,
le 9 Juillet 1816. Avec ses 16 voies, elle serait l’avenue la plus large du
monde. Du nord au sud, la gigantesque avenue conçue dans les années 1930 , sur
le modèle des grands boulevards parisiens, traverse Buenos Aires , parée de
superbes monuments et sertie de magnifiques immeubles : le palais de
justice de tendance architecturale gréco-romaine datant de 1910, le Teatro Colon
, luxueux opéra de 1908, judicieux mélange de Renaissance italienne et de
classicisme français ; apprécié des mélomanes et des musiciens par sa
taille, pouvant accueillir 3500
personnes , il l’est aussi par l’excellence de son acoustique comparable à
celle de la Scala de Milan .
L’avenue Corrientes, traditionnellement
surnommée « l’avenue qui ne dort jamais » groupe la plus grande
concentration de théatres et cinémas. C’est le Broadway de Buenos Aires avec
l’architecture art-déco. Ces nombreuses librairies font de cette avenue un lieu
de prédilection pour les intellectuels, les étudiants ; Nous avons flâné
sur l’élégante Avenida de Mayo qui relie La Casa Rosada au palais du Congrès de
la Nation ; Tout au long de cette avenue , la Maison de la Culture avec,
en haut de l’édifice, une statue en bronze qui représente Athena: dans sa main
levée ,un flambeau et dans l’autre , un écrit symbolisant la liberté de la
presse ; A remarquer ,le café Tortoni , café mythique fondé en 1858 par un
immigrant Français . Le charme du 19ème siècle y est toujours intact. Haut lieu
de la littérature, de la poésie et du tango, l’ambiance y est raffinée ;
Toute cette avenue est jalonnée de remarquables édifices comme le Palacio
Barolo, une œuvre dantesque, un mélange d’art nouveau et d’éclectisme ;
faute de temps, nous n’avons pu le visiter. De notre guide, nous apprenons que
ce chef d’œuvre architectural, est un hommage poignant à Dante Alighieri,
auteur de la Divine Comédie et de plus, il est le témoignage historique de
l’âge d’or argentin.
L’ambassade de
France se situe dans l’ancien palais Ortiz Basualdo dont la construction débuta
en 1912. C’est un architecte français Paul Pater qui réalisa cette œuvre,
exemple de l’influence française sur l’architecture argentine ;
Le
Micro Centro, la City, siège de la Bourse du Commerce
Groupe
de nombreuses banques de type londonien. C’est une zone très fréquentée avec
ses nombreuses tours, la plupart des ministères, sans compter l’effervescence
de la rue Florida : rue piétonne où se succèdent les enseignes
internationales et la Galerie Pacifico, centre commercial luxueux (la grande
coupole représente de superbes fresques réalisées par des artistes argentins
dont Berni). Au dernier étage, le Central Cultural Borges est dédié aux
expressions artistiques et technologiques les plus novatrices.
Le
lendemain matin fut consacré au quartier San Telmo,
tour à tour huppé, déchu et réhabilité par les
artistes et les écrivains, de ses rues pavées et pittoresques, de ses façades
un peu délabrées, San Telmo a gardé la nostalgie de l’époque où il était habité
par les riches ; L’épidémie de fièvre jaune, réapparue en 1871, a provoqué
l’exode des familles aisées vers le nord, vers Recoleta. Les plus pauvres prirent
alors possession des lieux, se partageant à plusieurs familles, l’espace vacant
de ces grandes maisons bourgeoises. Dans les années 1960, bon nombre d’artistes
y ont monté leurs ateliers fascinés par l’architecture du quartier et son
histoire. Tous les Dimanches, la Plaza Dorrego héberge la brocante ; sous
les ombrages du parc Lezama, se pressent les éventaires des bouquinistes et des
artisans. Le tango
s’invite en hôte impromptu, à chaque coin de rue, entre les
étalages et les terrasses de café au style vintage. Quartier plaisant, animé et coloré ! Une
manière de retrouver son histoire et la poésie d’un passé prospère! Alors, doucement, Buenos Aires
m’enivre ! Ici, c’est l’Europe tendrement, humblement recréée !
Comment ne pas s’émouvoir à la pensée que les descendants d’immigrants pensent
retrouver leurs racines dans ce singulier et modeste marché aux puces !
Nous quittons, dans l’après-midi, la
métropole, pour quelques jours et nous nous dirigeons vers Daireaux, à 410 km
de là, ville partenaire de Coutances (Manche). Arrivés de nuit, à la suite de
contretemps, nous avons été accueillis avec chaleur et émotions ! Notre
famille Mr Mme Musso et leurs enfants nous ont témoigné, tout au long de notre
séjour, gentillesse, générosité de cœur et un attachement que jamais nous
n’oublierons ! Chacun d’entre nous restera marqué par la qualité de leur
accueil. Je passerai sur les festivités organisées en notre honneur que ce soit
à Daireaux comme à Salazar.
La découverte des plaines fertiles de la
Pampa correspondait à l’image qui habitait mon imagination : d’une
horizontalité absolue, des paysages plats et monotones, elle s’apparente à un
océan de cultures, d’interminables champs de soja, de blé, de sorgho telle est
la Pampa humide, la plus fertile, véritable grenier du pays ! Les prairies
et ses importants troupeaux de bovins et de chevaux perpétuent la légende de
l’homme fier, courageux qu’est le gaucho !
Autrefois, il chassait le bétail sauvage, le pourchassait sur ces
grandes plaines en lançant au triple galop sa monture et, tout en évitant avec
adresse les ornières creusées par les tatous, il utilisait le lasso ou alors
les boleadoras, arme de jet comprenant plusieurs masses de pierre ou de métal.
Selon une technique empruntée aux Indiens, il les lançait avec une redoutable
précision. Les lanières s’enroulaient alors autour des jambes de la bête et la
faisaient culbuter, Mais, inexorablement, avec le regroupement des terres et du
bétail dans de vastes estancias, sa chère liberté va être réduite !
Enfants métissés
hispano-indiens, les gauchos avaient acquis leurs lettres de noblesse en
s’alliant aux armées de la libération. Courageux, connaissant le moindre recoin
des terres qu’ils avaient parcourues à cheval, sachant s’orienter de nuit,
selon les constellations, ils ne pouvaient qu’être de parfaits éclaireurs, lors
de la guerre d’indépendance(1816). A
l’image des premiers gauchos, des métissages se sont multipliés au fil du temps,
des Basques aux Italiens en passant par les cow-boys américains qui ont migré
au 19ème siècle !
Devenu salarié, au service des propriétaires d’estancias, le gaucho
rassemble, marque, soigne les troupeaux et excelle dans la méthode du dressage
des chevaux.
De
ses origines , il a conservé une agilité sans égale au rodéo ; Toujours coiffé du béret
basque ou du chapeau à large bord à la mode andalouse, foulard noué autour du
cou, ample pantalon, un poignard glissé à l’arrière d’un ceinturon incrusté
d’argent, il aime retrouver tous ses semblables, lors de la grande semaine de
la Tradition, à San Antonio de Areco (140 km à l’ouest de Buenos Aires ) ;
gaucho de père en fils , fier de l’être , il reproduit , vêtu de ses plus beaux
atours, les gestes anciens transmis depuis des générations ! Il aime sa
monture puissante, charpentée, rapide et endurante, le Criollo. Petit de
taille, capable de parcourir des centaines de kilomètres tout en portant, sans
faillir de lourdes charges, il est le cheval résistant de la pampa !
Excellent, il l’est aussi pour la jineteada, sport équestre de la culture
gaucho ;
Comment ne pas avoir de l’admiration pour la vie du gaucho dictée par
l’amour de la terre et le stoïcisme de la solitude, tout en gardant la notion
d’amitié et de solidarité envers son prochain ! La nostalgie des grands
espaces, il la chante, accompagné de sa guitare, entouré de ses semblables,
lors de leurs mythiques rencontres !
L’isolement
des estancias, dont certaines couvrent plusieurs milliers d’hectares, n’est
évidemment plus ce qu’il était autrefois , mais un style de vie en vase clos
autour de la maison du maître, souvent absent, de la cantine locale , des
dépendances qu’occupent les ouvriers agricoles , surveillés par l’homme de
confiance du patron ; Nous avons visité la « Candelaria » et
« Las Diez Lagunas »,
cette dernière propriété de la
famille Daireaux Très belles demeures avec grand parc arboré de multiples
essences exotiques. Toutes ces estancias témoignent d’une prospérité notoire, certes, mais
parfois ostentatoire !
Je ne pouvais m’empêcher de penser aux
conquêtes militaires, plus précisément à la « guerre du désert « entre
1879-1881 -qui décimèrent les indigènes ! Sous la pression de soldats
fédéraux du général Roca, la nécessité de disposer de grandes terres, rendit
impérieuse la conquête des territoires aux Indiens !!!!
A perte de vue, se déroulent des plantations de soja (génétiquement modifié) -l’or vert-
une manne précieuse pour l’Argentine, un eldorado pour les grandes entreprises !
La poussée du soja est telle qu’elle s’étend vers le nord-ouest du Brésil, la
forêt amazonienne !!! Pour répondre aux marchés hautement demandeurs, la
surface forestière tropicale recule toujours un peu plus, même si l’élimination
de la couverture végétale amazonienne entraîne une perte de la principale
source de subsistance pour les populations locales ! Mais ces techniques
de cultures sans labour, l’usage massif d’herbicides et d’engrais sont
susceptibles d’entraîner une perte de fertilité des sols et une contamination
des eaux !!!
Pour obtenir toujours plus de profits, la surface de la pampa est
convertie, en partie, en terres à soja et les immenses prairies, peu à peu ,
sont réduites pour y développer des stations d’engraissement du bétail ,
appelées feed-lots ; les bovins y sont nourris au maïs OGM pendant les 3
ou 4 derniers mois de leur vie ; ainsi, très vite , ils atteignent
rapidement le poids homogène et standardisé
J’ai remarqué que les agriculteurs argentins s’embarrassaient peu
d’infrastructures, comme les bâtiments de stockage des grains; la plupart sont
conservés dans des silos-sacs en polyéthylène s’étirant sur 60 m de long et 3
de large, en bordure des champs !
La
culture du soja a été absorbée par la filière biodiesel, source d’énergie
renouvelable pour remplacer les combustibles fossiles. Nous avons visité
l’usine Aripar Bio et pris connaissance de leur laboratoire dans lequel, les
employés veillent à maintenir les normes de qualité. Par trituration, les
graines de soja sont transformées en tourteaux pour l’alimentation du bétail, transformées
également en huiles, farines etc. … (visite de l’usine Oleaginosa Moreno
où travaille Mr Musso Daniel qui, si généreusement nous a reçus)
Nous avons été invités dans une petite ferme pour un délicieux asado
(barbecue argentin) la préparation est tout un art : la viande d’agneau rôtit
doucement à la chaleur des braises, sur des parillas (grils) ; les
morceaux sont découpés et servis par un gaucho, aidé de son inséparable
couteau
Le
tout avec une salade et une dégustation d’un bon vin rouge, sans doute le fameux
Malbec, notre gaucho a pris sa gourde et bu à la régalade : de ses bras,
il tenait haut la gourde et, bien renversée, elle délivrait un jet continu dans
la bouche ! Quelques un, amusés, l’ont imité. Puis vint le moment du maté,
l’infusion nationale ! La feuille, la yerba est récoltée dans le
nord-ouest du pays. Les Indiens Guaranis en consommaient depuis fort longtemps.
L’Argentin, à présent, en permanence. On attribue au maté différentes vertus
thérapeutiques : laxative, diurétique, antioxydant. On dépose les feuilles dans
le fond d’une calebasse et le tout est noyé d’eau chaude. Avec la bombilla,
sorte de paille en métal, on aspire l’herbe reposée, au moins deux minutes et
on passe la calebasse à son voisin, selon un rituel de fraternité et de
convivialité ! Vraiment
très intéressant ce séjour dans la pampa !!!
Ce n’est pas sans émotion que nous avons quitté nos familles, ce
Dimanche 22 Novembre ! Nos chauffeurs se devaient d’aller voter, devoir
obligatoire. En 1912, ce pays fut un des premiers au monde à avoir instauré le
vote obligatoire, l’abstention non justifiée est passible d’une amende !
Encore un fâcheux incident,
la courroie de distribution nous lâche en rase campagne!!!Secourus par un autre
minibus, nous avons regagné notre hôtel, au grand soulagement de nos
chauffeurs ; Ce Dimanche étant le second tour des élections
présidentielles, nous avons rejoint la foule dense des Argentins; le favori des
sondages et successeur désigné de Cristina Kirchner, était Daniel Scioli ;
Comme candidat de droite, Mauricio Macri; Lorsque le nom du président fut
connu, une immense clameur s’est élevée accompagnée d’ovations au son de la musique latine !
Mauricio Macri, un libéral de droite, l’un des hommes les plus riches
d’Argentine, mit fin ce soir-là à 12 années de règne successif des époux
Kirchner, leaders d’un péronisme de gauche et partisans du protectionnisme
économique !
Après une nuit bruyante, nous avons repris, dès le matin, la découverte
de Buenos Aires. D’un barrio à l’autre, irrésistiblement le charme de cette
capitale me pénétrait et m’invitait au jeu des analogies faisant référence à
d’autres capitales. Je me laissais gagner par la personnalité de cette ville
magique ! Elle semblait sortie d’un rêve, d’un miroir dans lequel se reflétaient
des patries perdues, mais réinventées ; Je songeais à ces fils,
petits-fils, arrière-petits-fils d’européens déracinés et je percevais cette
nostalgie encore si palpable….
A l’autre bout de la ville, l’ambiguïté nous guettait encore : le
quartier nord s’étend de la Plaza général San Martin au magnifique parc de
Palmero, avec ses hôtels particuliers en pierre de taille, ses immeubles haussmanniens.
C’est le riche quartier de la Recoleta, le Paris de la belle époque transplanté
en terre australe ; Le cimetière aux fabuleux monuments funéraires fait
songer à celui du Père Lachaise. L’entrée principale est un portique formé par
quatre colonnes doriques grecques. Les
dernières demeures de gens fortunés et des personnages politiques sont classées
monuments historiques, Les caveaux sont tous accolés les uns aux autres. Eva
Peron a été inhumée dans le tombeau familial des Duarte. Impressionnant ce
cimetière ! Recoleta est le quartier le plus huppé avec ses ambassades,
ses squares, ses parcs et ses rues très ombragées ;
La
magnifique et célèbre église Del Pilar se remarque, à côté du cimetière :
d’un blanc immaculé, elle est un exemple de l’architecture coloniale.
Actuellement, elle est classée monument historique national. L’ancien couvent de
Recollets lui est adjacent, la place des Nations Unies est ornée par la célèbre
Floralis Generica, une originale sculpture métallique de 20 m de haut !
Six pétales géants s’animant par un système hydraulique et des cellules
photovoltaïques ; les pétales s’ouvrent le matin et se referment le soir, au
cœur du quartier de la Recoleta, dans un jardin, elle suit le soleil !!
Elle est l’œuvre de l’architecte argentin Eduardo Catalano ; Quatre jours
par an, ses pétales restent ouverts la nuit : le 21 Septembre, début du printemps
dans l’hémisphère sud, le 25 Mai, jour de la patrie et les 24 et 31
Décembre.
A remarquer le Musée National
des Beaux arts ainsi que la bibliothèque !
Des images défilent dans ma mémoire : je revois
le Congrès de la Nation. Il s’inspire du Capitole de Washington ; Il est
le siège du pouvoir législatif ; Imposant avec son dôme recouvert de
cuivre qui, au fil du temps et en raison de l’humidité est devenu
verdâtre ;
Des librairies, la plus singulière, la
plus remarquable est la luxueuse librairie El Ateneo, avec au plafond, une
impressionnante fresque. Initialement, ce bâtiment avait été conçu comme théâtre
en 1919. Transformé ensuite en une salle de cinéma pour devenir cette étonnante
librairie qui a conservé la décoration de l’ancien théâtre : les loges, le
grand rideau rouge, les lumières. Les rayonnages ont remplacé les fauteuils
d’orchestre et les habitués y passent des heures, installés à lire dans les
anciennes loges ou à s’attarder au balcon en dégustant du thé. Un autre barrio très branché :
celui de Puerto Madero ! Nous avons
emprunté le pont de la Mujer (la femme). D’une conception originale et très
esthétique, il est divisé en trois sections : deux fixées sur les deux
berges du dock et une mobile qui tourne sur un pilier conique blanc et permet
ainsi le passage d’embarcations. Cette section centrale est soutenue par une
aiguille d’acier avec épine de ciment de 39 m de hauteur ; L’aiguille
d’acier est disposée en diagonale et d’elle pendent à la manière d’un pont à
haubans, les câbles qui supportent la section tournante.
Le pont de la Mujer est une pure merveille ! Il est l’œuvre du célèbre architecte espagnol Santiago Calatrava. Pont piétonnier et giratoire, changeant de position chaque fois que passe un bateau. Un système moderne d’illuminations du pont, la nuit, ajoute à la féerie de son ensemble !
Dans les quatre bassins de Puerto Madero sont aussi amarrés des voiliers, des bateaux de plaisance, mais l’élégante frégate Presidente Sarmiento (premier bateau-école de la marine) est amarré au quai numéro 3. Superbe trois-mâts aménagé en musée !
Le long des quais rénovés se sont ouverts restaurants chics, bars,
immeubles et lofts ultra modernes, sans oublier d’élégants gratte- ciel ;
C’est le lieu de rendez-vous de la jeunesse dorée portena ! A mentionner que ce quartier réhabilité a
été l’objet d’un des plus grands chantiers de rénovation, en Argentine !
Nous avons apprécié l’élégance de Puerto Madero en nous rendant à la
Bistecca ; immense buffet, grande variété de spécialités italiennes,
viandes cuites sur parillas : bife de chorizo (contre-filet) bife de lomo
(aloyau avec côte) etc. les traditionnels empanadas (chaussons cuits au four ou
frits garnis de viande hachée). De
nombreux desserts comme les alfajors, sortes de gâteaux composés de deux
biscuits réunis par une crème de confiture de lait (dulce de leche) ou de
mousse au chocolat. Je ne me souviens plus du nom d’un autre restaurant, sur le
port, dans lequel nous avions partagé des moments conviviaux !
Un autre barrio : très différent et si populaire ! La Boca et son célèbre stade : la Bombonera avec sa fameuse équipe de football, les Boca juniors, C’est sur cette pelouse que Diego Maradona, l’idole de toute une génération, remporta la coupe du Monde en 1986 grâce à ses fantastiques buts !
Un autre barrio : très différent et si populaire ! La Boca et son célèbre stade : la Bombonera avec sa fameuse équipe de football, les Boca juniors, C’est sur cette pelouse que Diego Maradona, l’idole de toute une génération, remporta la coupe du Monde en 1986 grâce à ses fantastiques buts !
Ce
quartier coloré recèle des charmes fous avec ses maisons aux tons de cassate
napolitaine, ses bistrots populaires où l’on vient déguster des pâtes au son du
bandonéon, cette petite Italie du Sud baignée d’une lumière froide me déroute
délicieusement ! La Boca fortement
marquée par l’arrivée de nombreux immigrants italiens, établis il y a plus d’un
siècle, reflète encore sa pauvreté palpable ; Lieu d’exil poétique, bercé
par les accents déchirants du tango dont la musique chante toute la nostalgie
de l’âme émigrante ! Pour rendre
leurs baraques de fortune plus attrayantes, ils se sont mis à les peindre,
influencés par leur peintre dont ils étaient fiers, Quinquela. Ce dernier a
consacré sa vie à exprimer l’atmosphère de son quartier
Il
s’est investi dans le célèbre passage – Le Caminito – qu’il a décoré de
fresques et de sculptures, créé un marché pour promouvoir les artistes locaux. Une
originale palette de franches couleurs, ce Caminito ! Nos regards s’y
attardent curieux et amusés et suivent avec intérêt les pas fougueux des
danseurs de tango !
Alors, ne trouvez-vous pas que cette capitale du bout du monde ressemble
à un caméléon ?
Comment ne pas se souvenir de cette croisière ensoleillée, dans le delta
du Tigre, constitué par les sédiments du Parana à son
débouché dans le rio de
La Plata !! Ses paysages pittoresques, fruits d’une imbrication étroite de
la terre et des eaux, se prêtent à la tranquillité de l’esprit, voire la
sérénité : des maisons sur pilotis accessibles par un ponton, la plupart
construites en bois, mais aussi de somptueuses propriétés se cachent dans cette
luxuriante végétation. Au fil des rios, nous croisons, amusés, des épiceries
mobiles ; Nous découvrons des édifices Belle-Epoque comme la surprenante
casa de l’ancien président Domingo Sarmiento, actuellement transformée en musée
historique, recouverte d’une protection vitrée.
Les portenos désireux de s’éloigner du tumulte de la capitale, se
ressourcent, le week-end, ici. L’immense delta du Parana leur ouvre les portes
d’un havre de verdure et de paix ; d’autres, pour moins souffrir de la
chaleur de l’été austral, se relaxent dans les magnifiques parcs de Buenos
Aires.
Sur la place – Paseo Chabuca Granda -, près de la très belle église de
Notre Dame de Pilar, un étonnant gommier, un ficus elastica âgé de plus de 200
ans, attire notre curiosité. De mensurations incroyables, il sert de terrain de
jeu aux petits portenos ; La base de cet arbre respectable est de 7 m et
quelques unes de ses immenses branches, 20 m ! Surprenant !!!
Une diversité d’arbres tel le Ceibo : sa fleur rouge carmin est
déclarée fleur nationale argentine le 23 Décembre 1942. Le Palo Borracho, au
tronc en forme de bouteille laisse échapper des boules de coton soyeux
lorsqu’éclatent ses fruits ; Le rose Lapacho avec son explosion de fleurs
est considéré arbre sacré des Indiens car il est le seul à être immunisé des
infections provenant des champignons. L’Araucaria est appelé -désespoir des
singes – à cause de ses feuilles rigides et pointues. El Ombu, arbre très
curieux à tronc épais, court, à longues racines, est utile comme le précise son
nom, pour son ombre. Les Tipas, variétés d ‘acacias, aux fleurs jaunes,
ont la particularité de porter des branches torturées.
Le génial paysagiste franco-argentin, Carlos Thays, a planifié la
floraison des arbres au rythme des saisons !!!, En 1891, ce Français
s’installe à Buenos Aires et pendant 22 ans, il crée des parcs, fait planter
150 000 arbres, instaure plus de 70 parcs et jardins publics, fait le tracé de
- Los Bosques de Palermo -d’après le modèle
du Bois de Boulogne ; Il crée le remarquable jardin Botanique .
Une image me revient ! J’ai oublié de parler de la magnifique
église orthodoxe – dans le barrio de San Telmo – Superbe, avec ses cinq bulbes
bleu-turquoise recouverts d’étoiles dorées, surmontés d’une croix ! Sur la
façade, trois vitraux et sur le fronton, une magnifique mosaïque. Véritable
symbole témoignant de la liberté de culte et d’ouverture d’esprit qui existe à
Buenos Aires !
Un détail amusant : croiser des personnes dont c’est le travail
pour plusieurs propriétaires, tenant en laisse une meute de chiens, de
différentes races, dans les quartiers chics ! Ces chiens trottinant côte à
côte, pas évident de les gérer tout en se souvenant du nom de chacun !!!
Oui, Buenos Aires, ville de nulle part, et pourtant si présente, m’a fascinée
! Ce qui m’a interpellée, est le fait qu’elle abrite le tiers de la population
du pays ! Alors, pourquoi ne penserais-je pas que tous ces émigrants ont pu
éprouver la peur à l’égard de la solitude, ce mal atavique qui leur colle à la
peau ?
Et
pourtant Buenos Aires ne s’arrête jamais ! Les innombrables cafés et
restaurants ne désemplissent pas, même au cœur de la nuit ! La ville est
culturelle à en juger par ses théâtres et music-halls plus nombreux qu’à
Londres, New-York ou Paris. N’oublions pas l’importante densité de librairies.
Fascinante ! Le souvenir
de Paris ou de Londres s’est à peine évanoui à l’angle d’une rue, au coin d’un
square, que déjà surgit une image milanaise ou un instantané madrilène !
Ce qui m’attendrit c’est que tous ces Argentins sont partagés entre la
fascination d’une patrie idéale conçue dans leurs rêves d’émigrants, et la
difficulté éprouvée à couper les amarres de leur vieille histoire dont ils ont
rompu le fil. La quête permanente d’identité s’avère un profond stimulant et
les pousse sur les voies d’un extrême raffinement !
J’ai
adoré cette ville sensuelle, magnétique
J’y
ai laissé un peu de mon cœur… avec, malgré cette chance de l’avoir découverte, le
regret de ne pas avoir poussé plus loin mon voyage, vers la barrière des Andes,
berceau de la vieille Argentine, domaine des Indiens Coyas, aux ponchos de
couleurs vives et chapeaux de feutre ronds
Vetty
Merci beaucoup à Vetty!!!! C'est du beau travail, quel bonheur de replonger dans ce voyage qui a permis à tout un groupe de Coutançais de découvrir cette terre Argentine et quel accueil chaleureux par nos Amis de Daireaux que nous remercions beaucoup. Tout reste gravé dans nos mémoires. Vetty toutes nos félicitations, et gros bisous à toi. Gisèle et Michel.
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